PROMETHEUS ET IGNIS FUGA Au commencement, il n'y a avait que le froid. Le froid et les ombres, qu'on croyait presque gelées. Les brises soufflaient, les dents claquaient, et les titans râlaient. Ils râlaient, du fin fond des enfers, de ne pas avoir droit à un sommeil profond, perturbé par les plaintes des humains, qui souffraient des gels. L'un d'entre eux s'était levé ; Prométhée, l'insolent, échappant à la garde du geôlier des titans, avait traversé le royaume des défunts, rejoint la terre et la bise, et puis s'était dressé, face aux dieux. Il rêvait avoir la bonne stature, convoitant le bon rôle auprès des formes de chairs et d'os, s'offrit un périple à travers contrée, revendiquant l'exploit à venir, le croyant déjà accompli.

Arrivé au centre du monde, il gravit les nuages, porté par l'échelle d'un vent trompeur, et déroba au sein même du palais des dieux le feu. Le feu était sacré, le feu était même le croquis de l'âme, brouillon réalisé par la terre-mère avant qu'elle n'accouche de ses premiers enfants. Le larcin entre ses mains, Prométhée avait dévalé le ciel, aidé par Atlas, et avait rejoint les humains. Ceux-ci, bien heureux d'avoir trouvé la solution, acceptèrent la torche, répandirent les braises. C'était le début d'une nouvelle ère. Le traître titan ayant trop proclamé ses exploits, avant même de les accomplir, fut retrouvé, enchaîné par les dieux en l'une des chambres les plus cruelles du Tartare. Les Hommes conservèrent les cendres, et ne furent condamnés qu'au rappel ; chaque noce de leurs enfants verraient les amants se brûler les doigts sur des flammes incandescentes, pour raviver le souvenir du premier vol.